Dix ans de theories, de fausses pistes, d’echecs aussi pour nos services de police…
Une decennie apres la decouverte des cadavres d’Agnes Dupont de Ligonnes et de ses quatre enfants, sous la terrasse de leur maison de Nantes, on ne sait toujours gui?re si leur assassin sera alors en life. Xavier Dupont de Ligonnes est-il en cavale ? A-t-il refait sa vie a l’autre bout une planete ? L’hypothese n’a rien de farfelu.
Mais De quelle fai§on reussit-on a disparaitre ainsi des radars ? Quelles paraissent les erreurs a ne point commettre si l’on reste traque par l’ensemble des polices du monde ? Pour tenter de le saisir, j’ai cherche a interroger quelqu’un dote d’une solide experience en la matiere. Un pro d’la cavale, en quelque manii?re. C’est ainsi que j’ai fait la connaissance de David Desclos, criminel repenti et roi de l’evasion.
Cela n’etait question, i l’origine, que d’un entretien a propos de XDDL. Sauf que le quotidien de David Desclos reste un tel roman que je suis reste, du coup, beaucoup plus a l’ecouter, scotche tel devant une serie tele… Avant de nous envoyer son avis sur l’affaire de Ligonnes, notre « expert » revient tout d’abord via sa propre carriere. Accrochez-vous !
LND : David, a quoi ressemble l’enfance d’un futur bandit ?
David Desclos : J’ai vecu dans un quartier difficile de Caen, rue Montcalm. On appelait ces logements HLM « Notre cite Plusieurs Sheitans » . Pour vous resumer le style, c’etait un brin la misere : une enfance tres pauvre, avec un pere delinquant. D‘ailleurs, la premiere image que j’ai de lui, c’est celle d’une visite au parloir d’une prison.
C’est donc par necessite que vous avez commence a voler ?
Exactement. Je volais parce que j’avais faim. J’ai commence tres petit a « chiner » du pain ou du lait en superettes. Et quand je revenais a domicile avec de quoi manger, j’etais super-fier de moi. J’etais le Gavroche une famille. Mais entre le vol d’une brique de lait et les attaques de banque, j’imagine qu’il y a eu quelques etapes. Ca a commence a devenir plus bon a la fin des annees 80, avec des vols « en xpress application de rencontre filouterie », tel on disait a l’epoque. Notamment, on entrait dans une enseigne, genre votre fleuriste, et on tapait la voiture pendant que les copains faisaient diversion a l’exterieur.
On prenait de jolies sommes – ca pouvait aller de 2 000 a 6 000 euros – qu’on se partageait ou qu’on investissait au shit concernant le Realiser fructifier. On entend souvent penser qu’on ne fout rien en cites, mais je peux vous dire que nous, a une maniere, on bossait ! (il rit)Et et, au debut des annees 90, nouveau palier. Oui, j’apprends a neutraliser des systemes d’alarme et, toujours avec la meme bande, on s’attaque a toutes les magasins de luxe. Puis on passe aux banques. La premiere, c’etait en 1996, une agence du Credit Agricole. On a passe le week-end a l’interieur Afin de ouvrir le coffre au chalumeau, au burin et au marteau, a l’ancienne, quoi ! Et on est repartis avec 250 000 euros. Apres, on a enchaine : Caisse d’epargne, BNP, bien ca… On ramassait 50 000, 100 000, voire 200 000 euros par coup.
Que faisiez-vous de tout cet argent ?
On le placait ! Au haschisch ou dans l’immobilier. On avait aussi une cagnotte Afin de payer les frais d’avocats en cas de pepin. La solidarite, c’est important dans notre milieu.
Combien etiez-vous dans la bande ?
On est une vingtaine. Sur un coup, on pouvait etre 4-5 ! L’argent nous brulait les doigts. Alors forcement, il y en avait forcement un concernant venir reconnai®tre, au bout de trois mois : « J’ai plus rien, je suis sec, vous devez y revenir ». Alors on y retournait. C’etait ca, l’engrenage (il soupire). On faisait des casses tel d’autres vont a Notre messe.
En decembre 1998, vous vous faites pincer via et cela devait etre ce « dernier coup »…
Exact. Je venais de me mettre en couple avec la femme de ma vie, j’esperais arreter les conneries, mais je m’etais engage aupres de mes potes pour un dernier coup, mais un gros ! Soit on en sortait millionnaires, soit c’etait la taule pour tout un chacun ! Mon option, c’etait de s’attaquer au siege social en Societe Generale, a Caen.
J’imagine que vous avez bien prepare votre coup.
Evidemment, comme i chaque fois. On avait fait le reperage, le plan etait simple comme bonjour : on passait par les egouts, ensuite il ne restait qu’a creuser un tunnel via quatre metres Afin de se retrouver a l’interieur. On a commence a creuser en septembre 1998, alors que ma chance est prevu pour le jour de Noel.
Qu’est-ce qui a foire ?
Un truc tout bete. Pendant les reperages, j’avais voulu prouver aux autres qu’il n’y avait aucune systeme d’alarme sismique. Du coup, j’avais balance un gros caillou sur la devanture en banque… Et j’avais raison, aucune alarme ne s’est declenchee ! Sauf que ca a eveille des soupcons. Forcement, le 22 decembre, J’me suis fait serrer avec mes fri?res en sortant du tunnel. La totalite des autres ont reussi a se barrer.
Cela est formidable, c’est qu’a peine arrete vous pensez a vous evader. Oui ! 1 semaine apres mon arrestation, on me transfere pour m’interroger a la PJ. Et la, dans la voiture, les flics me comparent a Spaggiari, l’auteur du « tire du siecle », a Nice en 1976. Ils me disent en rigolant : « Tu sais que t’es le nouveau Spaggiari ? T’as plus qu’a Realiser tel lui, il a mis quatre mois pour s’evader. » Eh ben moi, cinq minutes apri?s, je mettais les voiles !